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De l’apport de la théorie du Self de Winnicott à la construction de la Tâche Du Château pour l’exploration du vécu de l’abus sexuel avec l’enfant victime.
Résumé
A l’inverse de Sàndor Ferenczi, Donald Winnicott est probablement loin d'être l'auteur d'orientation psychanalytique le plus cité en matière d'abus sexuel. Pourtant, dans un de ses essais portant sur la communication (1963a), il évoque un dilemme présent chez l’artiste et relevant de la co-existence d’un besoin urgent de communiquer et d’un besoin, encore plus urgent, de ne pas être trouvé. Nous montrerons comment un tel dilemme, considéré dans son rapport à la théorie du Self, offre un cadre théorique puissant pour la compréhension et la prise en charge des victimes d'abus sexuel. Pour ce faire, nous présenterons donc ce dilemme dans son rapport avec ce noyau de la personnalité, le Self (Winnicott, 1963a). Nous nous intéresserons à la manière dont ce dernier peut communiquer et à la manière dont il doit être protégé des intrusions. Nous verrons comment l’auteur envisage ses défenses et les conséquences qu’aurait une violation de ce noyau Self par une communication qui se glisserait au travers des défenses (Winnicott, 1960a, 1960b, 1963a). Ce dernier cas de figure, même s’il n’est pas abordé comme tel par Winnicott, nous semble illustrer le vécu de l’enfant victime d’abus sexuel. Nous verrons comment les difficultés que ce dernier peut rencontrer donnent à ce dilemme l’allure d’un paradoxe au-dedans duquel le symptôme semble être la seule issue possible. Ensuite, nous aborderons la manière dont les apports de Winnicott (1958, 1963b, 1971) nous permettent de penser la prise en charge des enfants victimes en suivant, dans la constitution même du cadre thérapeutique, les fonctions naturelles de la mère et comment un tel cadre permet de dépasser cette forme pathologique du dilemme évoquée ci-dessus. Au moyen d'exemples, nous montrerons comment ce cadre théorique nous permet de penser les faits cliniques tels que la méta-révélation (Bullens, 2010), le viol psychique (Van Gijseghem & Gauthier, 1996), etc. et les faits protectionnels (notamment en lien avec les questions d'évaluation et les méthodes d'entrevue d'investigation dites non-suggestives). Enfin, nous présenterons l'état de nos travaux quant à la construction d'un outil d'exploration métaphorique de l'abus sexuel pour la prise en charge des enfants victimes. En effet, confronté sur le plan pratique aux difficultés d'évocation, dans la thérapie, du vécu lié à l'abus sexuel et ce, consécutivement aux bouleversements dus à l'abus en tant que tel mais aussi à la période de dévoilement et à la phase d'intervention protectionnelle ; et nourrit théoriquement par le cadre conceptuel offert par Winnicott : nous avons créé un outil d'exploration métaphorique de l'abus sexuel, la Tâche Du Château. Nous présenterons aux participants les étapes de création de l'outil en rapport avec les référents théoriques qui, s'ils s'inspirent en grande partie de Winnicott, se revendiquent aussi de l'approche structuraliste des frontières familiales telle qu'élaborée par Salvador Minuchin (1979). Nous illustrerons la Tâche Du Château par ses consignes et sa méthode de passation et présenterons les résultats de notre phase pré-test. Nous nous attarderons plus longuement sur l'un d'eux au moyen d'une vignette clinique. Celle-ci nous permettra de comprendre en quoi la Tâche Du Château permet une exploration respectueuse de l'enfant (en regard également du cadre théorique), et ce, dans une co-construction avec le thérapeute. Nous illustrerons l'importance des liens pouvant être établis entre la matérialité des faits et l'exploration métaphorique proposée à l'enfant. Ce dernier constat nous amènera aux perspectives de développement futur de la Tâche Du Château et aux risques qui s’y rapportent.